Le projet de naissance en cas de césarienne

Le plus souvent, dans un projet de naissance classique, la première partie concerne l'accouchement physiologique tandis que la deuxième n'est qu'une annexe en cas de complications.

Mais lorsqu'une césarienne est programmée ou potentiellement prévue, la partie secondaire compose la base du projet. Et l'accueil du bébé prend une place singulière. Voyons ensemble quelques pistes de réflexions, tout en gardant bien à l’esprit que c’est à adapter individuellement.

Au-delà du vécu technique

« Ce qui est généralement retenu de l'accouchement, c'est que c'est un moment à prendre en charge médicalement au nom de la sécurité. Néanmoins, c'est surtout un événement où entrent en jeu le corps, l'émotionnel et la sexualité. Ne pas négliger ou occulter ces aspects est essentiel. » (La naissance autrement, éditions Jouvence, p.47)

C'est pourquoi, encore plus lors d'une césarienne programmée, le projet de naissance a toute sa place. À la fois support de réflexion personnel pour rester acteurs de l'accouchement, et support de discussion avec l'équipe médicale, c'est un outil qui peut changer la donne pour aller au-delà du vécu technique de cette intervention chirurgicale. À vous d'être informés et audacieux, à vous d’oser !

Demandes possibles et légitimes

La péridurale (rachianesthésie). Elle permet à la femme d’être consciente et présente lors de l’arrivée du bébé, contrairement à une anesthésie générale. Elle permet de réaliser la première rencontre, le premier échange de regards, le premier peau à peau ou câlin joue à joue.

La présence d’un tiers (conjoint, doula, amie). C’est une présence rassurante dans un environnement inconnu, un accompagnement précieux dans un moment de vie intense. La césarienne n’est pas qu’une intervention chirurgicale : c’est aussi un accouchement.

Ne pas extraire le bébé du ventre sans demander à la femme de « pousser », afin de la laisser participer activement à la venue au monde de son enfant.

Baisser le champ opératoire pour voir le bébé, surtout si le chirurgien prend le temps de laisser le nouveau-né s’adapter en douceur.

Demander que le sexe ne soit pas annoncé, d’autant plus si aucune échographie ne l’a dévoilé pendant la grossesse. Expressément demander à ce que cette découverte soit le privilège des parents. Souligner l’importance d’avoir la surprise.

Avoir un bras mobile, pour toucher le bébé après sa naissance, l’enlacer, voire le « porter » sur sa poitrine (si un tiers est à côté). Cet instant est à protéger. Une mère qui regarde et sent l’odeur son bébé pour la première fois, dans un environnement respectueux (quand on peut prendre le temps) sécurise aussi la relation future.

Faire une première mise au sein précoce, dès que le bébé en manifeste l’envie. Prendre le temps de la rencontre, de la reconnaissance, de la découverte l’un de l’autre. C’est possible, en dehors de toute urgence médicale bien sûr, et lorsque l’on veut bien ne pas alourdir les choses de protocoles inutiles ou qui peuvent attendre. Le bien être de la mère et de son enfant devrait primer sur la gestion des services hospitaliers.

Privilégier le peau à peau avec le père, pendant la suture. Réduire au maximum les temps de séparation avec la mère. Réduire au maximum les gestes non-urgents. Pas de bain dans les premières 24h (ce que les parents pourront faire eux-mêmes plus tard ou dans la chambre de l’hôpital). Pas de biberon si l’allaitement est souhaité.

En cas de nécessité de soins médicaux pour le bébé, demander que le tiers soit présent afin de le rassurer, et qu’il puisse aussi rassurer la mère ou faire quelques photos pour les lui montrer ensuite.

Raccourcir au minimum le temps de présence en salle de réveil s’il n’y a pas eu d’anesthésie générale, afin de bénéficier rapidement de la compagnie du tiers présent. Encore plus facilement aménageable dans le cas initial où un accompagnement avec une sage-femme libérale était prévu « en plateau technique », si elle reste en cas de césarienne (rare, mais possible).

Un exemple de formulation d’introduction

Avant d’écrire le projet de naissance, il est possible de formuler une introduction visant à (dé)montrer que vos demandes ne sont pas « contre » le corps médical mais « pour » que l’accouchement soit le mieux vécu possible, au vu des circonstances.

« Avant tout, nous remercions vivement chaque membre du corps médical qui lira ces lignes » ; « Merci de prendre un peu de votre temps pour prendre connaissance de notre projet de naissance pour ce bébé » ; « Même s’il s’agit dans notre cas d’une césarienne (d’urgence / prévue) cet événement reste une naissance. C’est pourquoi nous voulons être des acteurs responsables de la naissance de notre enfant » ; « Au fur et à mesure de l’avancée de cet événement, nous désirons rester des interlocuteurs et non pas des sujets, et cela quoi qu’il arrive ! » ; « Nous vous sommes reconnaissants, dans la mesure du possible et en dehors de toute pathologie, de tenir compte de notre désir concernant la naissance et l’accueil de notre enfant » ; « Nous vous sommes reconnaissants de tenir compte de notre désir d'accueillir notre enfant dans le plus grand respect pour lui, et en lui réservant une arrivée la plus douce et humaine possible. Il est important pour nous, de participer à accueillir notre enfant dans la douceur, aussi, nous souhaitons vraiment que les choses se déroulent ainsi… »

Structurer et clarifier ses demandes

J’ai lu beaucoup de projets de naissance formulés dans le « nous » (nous souhaitons que). Toutefois je pense judicieux d’utiliser le « je ». Pourquoi ? Parce que c’est la femme qui accouche, parce que c’est dans son corps que tout se joue, parce que juridiquement parlant le contrat de soins se fait entre elle et les professionnels de santé, parce que c’est donc elle l’interlocutrice même si le tiers présent peut être amené à rappeler un point du projet de naissance. Il vous revient de décider de la formule que vous préférerez, mais en attendant, lisons ensemble cet exemple de formulation, vous êtes d’accord ?

  • Je souhaite une anesthésie péridurale (rachianesthésie).
  • J’aimerais que (mon/ma conjoint-e, ma sage-femme, ma mère, ma doula) soit présent(e)
  • Si le respect des autres patients est un obstacle à la présence d’un tiers en salle de réveil, je demande à ce que ce passage soit raccourci au minimum. La présence constante de ma sage-femme à mes côtés étant une sécurité suffisante en l’absence d’anesthésie générale.
  • Certains établissements peuvent proposer une ligature des trompes en cas de 3ème césarienne ou plus pour la mère. Je précise donc, qu’en aucun cas, je n’accepte une telle intervention.
  • Je souhaite voir la naissance de mon enfant (le champ opératoire pourra être baissé au besoin).
  • Dans la mesure du possible, je veux avoir un bras mobile pour toucher bébé, après sa naissance, l’avoir sur ma poitrine. Ayant déjà accouché j’ai à coeur de revivre ce moment : reconnaître, parler, sentir mon bébé.
  • Le père de l’enfant aimerait porter son bébé pendant la suture. Et si possible j’aimerais les avoir tout près de moi.
  • Je souhaite mettre mon bébé au sein, toujours en peau à peau, dès que cela est possible.
  • Merci de reporter tous les gestes non-urgents, ou qui peuvent être faits ultérieurement, ainsi que le bain que nous ferons plus tard avec le papa, dans la chambre de l’hôpital.
  • Si des gestes médicaux s’avèrent nécessaires pour l’enfant, merci de laisser quoi qu’il arrive, le papa être présent auprès du bébé.
  • Enfin, précision essentielle : ce bébé est pour nous, la plus belle des surprises. Aussi, découvrir son sexe, se fera en temps choisi. Nous remercions donc l’équipe médicale, de ne jamais dévoiler à haute voix son sexe, avant que nous ayons pu faire cette découverte nous-mêmes.

Autre exemple de projet de naissance

  • Au moment de la naissance, nous souhaitons que le champ opératoire soit abaissé, afin que nous puissions voir naître notre enfant.
  • Dans la mesure du possible, nous demandons que l’enfant et le placenta soient sortis simultanément de l’utérus, et qu’ils soient présentés ainsi aux parents, afin que le père puisse couper le cordon. Dans la mesure où cela ne serait pas possible, nous vous remercions de mettre le placenta de côté, afin que nous puissions le voir et le garder.
  • Nous aimerions que l’enfant soit posé sur la poitrine de sa mère afin de les laisser se reconnaître et se sentir un long moment. Et si elle peut avoir un bras mobile, cela l’aiderait à pouvoir toucher son bébé.
  • Merci de ne pas nous dévoiler le sexe de l’enfant. Nous souhaitons faire nous-mêmes notre découverte en temps choisi.
  • Merci de ne pas emmener l’enfant pour des soins non urgents ou le bain, et laisser le bébé enveloppé mais nu et non lavé sur son père pendant le reste de l’intervention. Si des soins sont absolument nécessaires, nous vous remercions de les faire au bébé dans les bras de son père.
  • Nous voudrions éviter d’éloigner père et enfant de la présence de la mère afin de permettre de continuer cette proximité en salle de réveil, si possible accompagnés de notre sage-femme. Il est important pour nous que la mère et l’enfant soient en peau à peau, pour les retrouvailles et la première mise au sein.
  • Nous indiquons également que nous acceptons l’instillation de collyre, mais que nous demandons à ce que la vitamine K1, ne lui soit donnée qu’après la première tétée.
  • Nous voulons ensuite retrouver notre intimité, accompagnés de notre sage-femme, dans notre chambre, où se fera en temps choisi le premier bain de notre enfant.
  • La maman souhaite garder son bébé dans son lit 24h/24. Elle souhaite aussi que l’allaitement puisse être conduit à la demande.
  • Fait à « tel lieu », le « telle date ».
  • Ce projet de naissance est lu et approuvé par le père XXX, la mère XXX, la sage-femme XXX, …

Le point sur la mise en forme

Au vu de ces exemples, à vous de définir vos priorités selon votre cas de figure. La césarienne est-elle prévue pour pathologie de la mère ? pour la santé du bébé ? ou les deux ? A-t-elle été décidée pour dépassement de terme ou suite à un déclenchement qui n’a pas abouti ? Est-elle prévue pour convenance personnelle ? Chaque circonstance déterminera les possibles ou les non-possibles. Mais quoi qu’il en soit, même aménager des petites choses quant à vos envies sera toujours un plus, pour faire de votre accouchement un moment unique.

Et puis même si rien n’est écrit sur le papier, gardez à l’esprit que vous êtes une interlocutrice à part entière, que vous pouvez exprimer, et que vous avez des droits. C’est vous la femme, la mère, et celle qui sera aussi détentrice de l’autorité parentale une fois le bébé né. C’est votre positionnement et votre assurance qui feront la différence. Alors à vous de jouer !


Ressources : livres et associations

Césariennes : questions, effets, enjeux

Michel Odent, éditions Le Hêtre, mai 2020.

Césarienne et AVAC (accouchement vaginal après césarienne)

Association Césarine, éditions L'Instant présent, octobre 2017.

Une autre césarienne ou un AVAC ? S'informer pour mieux décider

Hélène Vadeboncoeur, éditions Fides, octobre 2013.

www.cesarine.org

association Césarine : échange, soutien et information autour de la naissance par césarienne.

www.avac-info.org

association Accouchement vaginal après césarienne : dénonce le recours non-nécessaire à la césarienne et fait la promotion de l'AVAC.

Travaillons ensemble !

Parce que dans la « préparation à la naissance » classique, ou lors de votre suivi de grossesse, on vous parle rarement de faire un projet de naissance, de vos droits en tant que patient, ou des choix et alternatives possibles, je vous propose de combler ce manque grâce à un soutien personnalisé. Contactez-moi pour en parler, d'accord ?

Se préparer avant

Mère de famille nombreuse, auteure de plusieurs livres autour de la naissance et consultante périnatale, j'encourage les parents à (re)trouver leurs compétences à travers une écoute privilégiée. De l’idée d'un projet à sa réalisation pratique, il y a tout un cheminement dans lequel je peux vous accompagner.

Être accompagnée

Certes les femmes savent accoucher sinon l’espèce humaine serait éteinte. Pourtant s'en remettre à la nature en se disant que tout va bien se passer n'est pas suffisant. Pour accoucher naturellement dans un milieu médicalisé, il est important de partir avec un bagage de connaissances et ressources spécifiques.

Décider et négocier

Grâce à mes recherches, à mon investissement associatif au coeur d'un réseau de professionnels et de parents, je suis à même de transmettre des informations essentielles. En effet, beaucoup de parents déplorent avoir manqué d'information tant médicale que concernant leurs droits, mais également sur les possibilités réelles qui s'offrent à eux. Pour ne pas être de ceux qui disent « Si j’avais su » : contactez-moi. Vous pourrez ainsi exercer vos choix en conscience, à votre rythme et en toute autonomie.

Sophie Lavois

Autrice, consultante, et animatrice.

Experte en émancipation et empowerment.

Accompagnement des femmes.

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